Aïcha Ech-Chenna|Une vie au service des droits des femmes et des mères célibataire au Maroc

Aïcha Ech-Chenna (1941 – 2022) est une figure emblématique de la lutte pour les droits des femmes, connue pour son travail remarquable en faveur des mères célibataires et des enfants nés hors mariage au Maroc. Elle a fondé l’Association Solidarité Féminine en 1985, une organisation qui vise à offrir un soutien psychologique, médical et éducatif aux mamans seules en difficulté. Son engagement pour améliorer la condition féminine dans son pays lui a valu des menaces, mais également une reconnaissance internationale. Surnommée « la mère courage du Maroc », son combat incessant force l’admiration.

Aïcha Ech-Chenna, de son enfance à son combat pour les femmes célibataires et leurs enfants

L’enfance compliquée d’Aïcha

L’histoire d’Aïcha Ech-Chenna est celle d’une dame forte et déterminée, qui a surmonté de nombreux obstacles pour aider les femmes démunies. Née à Casablanca en 1941, elle a grandi dans un foyer pauvre. Sa famille part vivre à Marrakech où son père est chef de chantier. Il décédera d’une tuberculose alors qu’elle n’a que 3 ans. Quelques mois après, sa petite sœur succombera à une leucémie. Sa mère, âgée de 20 ans, se remarie. Aïcha doit quitter l’école à l’âge de 12 ans et porter le voile intégral. Ces décisions sont prises par son beau-père. Sa maman ne supporte pas cette situation et l’envoie retrouver une tante à Casablanca. Aïcha peut alors poursuivre ses études, mais est obligée d’arrêter de nouveau à 16 ans, quand sa mère, qui s’est séparée de son mari, la rejoint. Elle doit alors subvenir au besoin de sa famille.

La terrible découverte de la réalité des femmes mères

Aïcha commence à travailler comme secrétaire dans un hôpital, tout d’abord au service des lépreux, puis au sein du programme National de lutte contre la tuberculose. À 19 ans, elle réussit le concours d’infirmière. Elle est ensuite animatrice durant de nombreuses années pour l’Éducation Sanitaire et Sociale à la préfecture médicale de Casablanca. C’est là qu’elle prend tristement conscience du quotidien intolérable des gamins nés hors mariage et des mères célibataires. Alors qu’elle vient d’avoir son 4e enfant, Aïcha ne supporte plus cette douloureuse réalité et elle décide d’agir. Commence alors une lutte quotidienne qui fait d’elle aujourd’hui, une figure incontournable des plus grandes militantes féministes.

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Le début d’un engagement sans limite pour le droit des femmes

Naissance de l’Association Solidarité Féminine

En 1985, Aïcha Ech-Chenna fonde l’Association Solidarité Féminine (ASF), première structure dans le monde arabo-musulman à agir ouvertement en faveur des mères célibataires. L’organisation compte quelques bénévoles au départ, puis grâce à un travail acharné, connaît un succès grandissant.

Un large éventail de services est proposé aux femmes en difficulté. L’association dispose d’un hébergement pour les filles enceintes et les mamans célibataires où elles reçoivent un soutien nécessaire pour se reconstruire. Elles peuvent également participer à des programmes de formations professionnelles pour améliorer leurs compétences et favoriser leurs chances de trouver un emploi.

En plus de cela, l’association a mis en place un projet de parrainage pour les enfants abandonnés, qui peuvent être aidés par des personnes s’engageant à financer leur éducation.

→ Et en France ? Découvrez la réalité de ces femmes invisibles : Les Femmes SDF en France | Dans l’Ombre de la Rue – Celles qui osent (celles-qui-osent.com)

Un militantisme qui s’étend au-delà de l’association

Aïcha Ech-Chenna n’aura de cesse de vouloir améliorer la condition féminine au Maroc. Elle n’a pas peur de prendre la parole et ose parler de sexualité, de viol, d’avortement. Elle plaide sans relâche pour changer ou abroger certains articles de lois.

En 1996, elle publie Miseria, un livre qui raconte la vie de petites bonnes ou gosses délaissés et qui émeut l’opinion marocaine.

En 2004, sous la pression de son association et d’autres militantes, le code de la famille a été réformé, permettant aux mères célibataires de donner un nom à leur enfant. Elle oeuvre également pour que le droit à l’avortement notamment en cas de viol, soit autorisé.

En 2013, ASF publie À hautes voix, nouveau recueil de témoignages du combat mené par de jeunes mères célibataires et celui de leurs enfants.

Entre haine et reconnaissance de son travail engagé pour la cause féministe

Un parcours pas toujours si simple

« J’ai sacrifié ma vie pour ce combat, c’est dur, je souffre beaucoup, mais je continue » Interview Aïcha Ech-Chenna (Le Monde 2017)

Malheureusement, le travail d’ Aïcha Ech-Chenna n’est pas toujours facile. Elle est confrontée à de nombreuses critiques et à de l’hostilité de la part de certains secteurs conservateurs de la société marocaine. En effet, le Maroc est un pays très traditionnel où les normes communautaires sont très strictes. La sexualité hors mariage est taboue. Les naissances qui en découlent ne sont pas acceptées et conduisent à des situations de marginalisation et de précarité. Les femmes célibataires sont souvent vues comme des parias et sont exclues de la société.

Aïcha reçoit régulièrement des insultes. En 2000, une fatwa est lancée contre elle. En 2007, elle souffre d’un cancer. Mais celle que l’on nomme affectueusement la « mère courage », ou la « Mère Teresa » du Maroc ne baisse pas les bras. Elle reçoit le soutien du Roi et de nombreux contributeurs.

→ Vous avez envie de découvrir la vie de femmes héroïques et engagées ? : Biographie de Nawal El-Saadawi | Celle qui osa défier son pays – Celles qui osent (celles-qui-osent.com)

Une reconnaissance mondiale de son travail

Tout au long de son engagement, Aïcha Ech-Chenna obtient de nombreuses récompenses saluant son engagement, notamment :

  • le Prix des droits de l’homme de la République française (1995) ;
  • le Prix Grand Atlas (1998) ;
  • la Médaille d’honneur reçue par le roi du Maroc Mohamed VI (2000) ;
  • le Prix Elisabeth Norgall (2005) ;
  • le Prix Opus Prize (2009 États-Unis) ;
  • la nomination Chevalière de la Légion d’honneur française (2013) ;
  • le Prix de la Banque Mondiale (2015).

Ces prix sont une reconnaissance du travail exceptionnel d’Aïcha Ech-Chenna pour aider les femmes vulnérables dans la société marocaine.

Les efforts d’Aïcha Ech-Chenna et de son association ont permis d’améliorer la vie de nombreuses mères célibataires au Maroc et de leurs enfants en leur offrant un abri, des soins de santé et des possibilités de formation professionnelle. Sa contribution à la lutte contre la discrimination et la violence envers le sexe féminin force l’admiration. Son décès en septembre 2022 a suscité un vif émoi. Aujourd’hui, elle est un exemple de combat pour les droits des femmes, droits souvent durement acquis et jamais à l’abri d’une remise en question. Celles qui Osent vous propose régulièrement des histoires féministes et inspirantes. Pour vous tenir au courant des derniers articles, n’hésitez pas à vous abonner à la newsletter !

Caroline Herrera, pour Celles qui Osent.

Sources :

Aïcha Ech-chenna, la voix des femmes sans voix au Maroc – Archive ouverte HAL (univ-lorraine.fr)

Aïcha Ech-Chenna, figure de la lutte pour les droits des femmes au Maroc, est morte (lemonde.fr) Aïcha Ech-Chenna, celle qui a permis de légaliser l’avortement au Maroc – Elle

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