Comment retrouver une vie sexuelle épanouie post cancer ? 5 conseils de guerrière 💪
On a encaissé la nouvelle, on s’est mangé les traitements, on a fait face, pas le choix. On l’a vaincu, en tout cas pour l’instant. On va gentiment faire nos contrôles tous les 6 mois, histoire de ne pas trop l’oublier quand même. On a fait le nécessaire pour préserver nos proches, souvent on n’a pas tout dit, en tout cas pas à eux.
Le cancer, on y laisse des plumes, OK. Et après qu’est-ce qu’on en fait ? Dans le corps comme dans la tête, on n’est plus tout à fait la même… Mais si c’était pour se sentir mieux qu’avant ? Bon, pas comme ça, d’un coup de baguette magique… Cependant c’est possible, ça arrive même souvent : la maladie, après le combat, peut devenir source de renaissance. Bien des aspects de notre vie peuvent être repensés après l’épreuve. Alors qu’en est-il de notre sexualité ? Comment renouer avec ce corps chamboulé, retrouver confiance en soi, et sentir de nouveau les papillons du désir et la douce chaleur du plaisir ? Voici 5 conseils testés et approuvés par mes soins, après un cancer du col de l’utérus il y a 2 ans. Pour vous aider à remettre du Q à votre planning de meuf qui ose !
1 – S’accorder du temps pour s’en remettre
Printemps 2022. J’ai fini les traitements il y a 3 mois. Je subis encore les effets secondaires.
La radiothérapie interne a atrophié mon vagin. Et surtout, je ressens les premiers signes de la ménopause chimio-induite : bouffées de chaleur et baisse évidente de libido. D’aucuns diront que je suis impatiente. C’est vrai. Mais surtout j’ai peur… Je sens bien que ma petite flamme intérieure est éteinte. Que j’ai pris dix ans en 6 mois. Et si ça ne revenait pas ? La foi, l’énergie, le courage. On disait de moi que j’étais solaire. Et ça n’est plus moi dans le miroir. Le poids perdu a fait s’écrouler mes seins. Les cernes et les rides se sont creusées. Et je porte encore le boîtier sous-cutané dans lequel on injecte la chimiothérapie à la clavicule droite, entouré de ses soeurs jumelles, les cicatrices. Qui pourra bien encore avoir envie de moi ? Même moi, je n’ai plus envie de moi… Pour ne rien arranger à la déprime, la culpabilité me ronge. « De quoi tu te plains ? Il était tout petit, ce cancer. T’avais pas de métastases, t’as même pas perdu tes cheveux… Bon d’accord, ta poitrine a morflé, mais au moins, toi, t’as gardé tes seins ! Et puis quoi, t’es vivante, non ? Tu vas pas nous emm*** avec ta coquetterie ! ». Ça n’est pas de la coquetterie. C’est la perte de confiance en soi, en son pouvoir de séduction, en ses compétences autres qu’esthétiques (merci au patriarcat et à l’éducation genrée 😒…), en sa capacité à rebondir et à être de nouveau bien dans sa vie sexuelle, pour soi comme pour l’autre. Vais-je en être capable ? De toute façon, je n’ai pas vraiment le choix. Chéridoux est resté. Honnêtement, c’est d’abord pour lui que je relève le défi. À moi, je fais deux promesses : ce sera sans pression et pour mieux encore ! La réappropriation de soi, c’est long… mais c’est bon !
2 – Démystifier le physique pour accepter son nouveau corps
Je suis moins belle qu’avant. Mais cette problématique n’est pas propre au cancer, même si, forcément, il en a rajouté une couche, le bougre. Elle est aussi celle du corps après les grossesses, celle du vieillissement ou d’une forte prise de poids, par exemple. La comédienne et féministe Noémie Delattre en parle très bien dans son spectacle « L’harmonie des genres ». Vous savez, ces complexes qui viennent nous obnubiler sous les draps, nous empêchent de lâcher prise et donc de vraiment prendre notre pied. « Qu’est-ce qu’il voit, d’ici, Chéridoux ? », se demande la petite voix intérieure de l’auto-critique. Et bien pas la même chose que nous, figurez-vous ! Ma poitrine abîmée, il l’aime parce qu’il peut la toucher et la manger à loisir (il paraît qu’ils rêvent tous d’avoir des seins pour se peloter 🤭 !). Quand je vois la laideur de mes cicatrices, lui se réjouit de pouvoir réinvestir cette zone et il la couvre de baisers. Et lorsqu’il pose sa main sur mon ventre et que j’ironise en imitant le bruit du flan qui bouge (si si, je vous jure, je fais ça très bien 😅 !) , il me répond qu’il trouve ça doux et sensuel… J’ai de la cellulite, la peau qui se relâche, et je fais depuis peu la chasse aux poils au menton (pu*** de testostérone !), mais Chéridoux, lui, il s’en fout ! Il savoure ma féminité lorsque je sors une robe et que je maquille mes yeux. Il enfouit son nez dans mon cou et me dit que je sens bon. Et par-dessus tout, il fond de me voir retrouver ma joie de vivre et mon sourire. Offrez-vous de nouveaux vêtements, changez de coupe si ça peut vous faire du bien, optimisez votre alimentation et votre activité physique pour être le plus en forme possible…ou pas ! Mais surtout, misez sur la carte bonheur en pratiquant des activités que vous aimez ou que vous ne faisiez pas avant (moi, par exemple, j’écris… Et ça me met en joooooiiiieeee !). Une femme qui rayonne est toujours désirable. Peu importent les signes du temps ou les stigmates d’une fichue maladie. Le style, l’attitude et la richesse intérieure n’ont ni âge ni physique, mais ils boostent la confiance en soi.
« La crainte ajoute à nos peines comme les désirs ajoutent à nos plaisirs »
Charles de Montesquieu
3- S’y plonger en pensées pour retrouver le désir
D’après Andrée Lehmann dans « L’atteinte du corps, une psychanalyste en cancérologie » (éditions Erès, 2014), « Le corps malade envahit la vie psychique ». Et le corps guéri, alors ? N’est-il pas un modèle de résilience ? Je ne ressens plus de désir. Mais suis-je d’accord avec ça ? Sûrement pas ! Mon bonheur sexuel ne peut pas s’arrêter là, à l’aube de mes 40 ans. Je suis à un carrefour : soit je me lamente en arguant que ça n’est pas juste (non, ça ne l’est pas, mais il faut le digérer) et j’opte pour la résignation. Soit je repars au combat, l’issue de ce dernier étant belle et stimulante. Je sors donc la carte « intention » et je décide de reconquérir mon corps via mon cerveau. Je lis le livre de Pascaline Lumbroso « Ménopause métamorphose » (Hachette, 2023) pour me défaire des idées reçues. Je clique sur tous les articles “Du Q” de CQO et visite leurs liens sexo. Je vais chercher au fond de moi les fantasmes ensevelis, les envies non assouvies, les tabous. Je m’offre le temps de la visualisation. J’envoie valser les carcans et me réinvente une sexualité… en pensées ! Et ça marche. L’imaginaire humidifie mon entre-jambe et m’aide à avoir de nouveau envie de me faire du bien. Car ça commence par là. S’aimer soi-même. Retrouver les pulsions et les assouvir sans se préoccuper de rien d’autre que de son plaisir. Sans le regard de l’autre. Sans mon propre jugement, et l’anxiété de ne pas y arriver. La solitude a du bon et avec ou sans Chéridoux, je retrouverai mon désir ! Célibataire ou en couple, il en va de notre santé mentale et physique, puisque la sexualité fait pleinement partie de l’équilibre et du bien-être. Les bienfaits de la jouissance ne sont plus à démontrer, qu’elle soit le fruit de la masturbation ou des ébats amoureux. Évidemment je projette de m’offrir cet aspirateur de clitoris dont tout le monde parle et que je n’ai pas encore essayé, mais qui commence sérieusement à attiser ma curiosité 🤩. Il est temps de reprendre les rennes de cette sensualité en berne et de recouvrer une autonomie du plaisir !
4 – S’exprimer pour éviter les maladresses
« L’intimité et la complicité sont les préalables à toute rencontre amoureuse et/ou sexuelle. Le toucher, le regard, le corps à corps et l’écoute permettent de conserver ce lien, et cela participe au maintien ou à la reprise de la sexualité »
souligne Eliane Marx psychologue-sexologue libérale à Strasbourg.
Alors vous l’aurez compris, j’ai la chance d’avoir un compagnon qui m’aime, me désire, me respecte et est attentif à mon plaisir. Il a toujours cru en ma renaissance sexuelle quand moi j’en doutais sérieusement. Jamais il ne m’a mis la pression, ni pendant ni après la maladie. Quand pression il y avait, je me la mettais toute seule. Les médecins me l’ont dit : il FAUT maintenir une activité sexuelle régulière pour éviter que l’atrophie vaginale n’empire… Gloups. Pour ajouter au malaise, mon homme a peur de me faire mal. Et il a raison. Nouveau tirage de carte : chakra gorge ! La sacro-sainte communication. Pas facile non plus, la place du partenaire. Même avec de l’amour et de la bonne volonté, ils ne peuvent pas tout deviner de nos états d’âme et de cul. C’est vrai en toutes circonstances, mais pour retrouver un épanouissement sexuel à deux avec cette nouvelle donne, c’est carrément indispensable. Alors quand on n’a pas envie, on le dit. Quand on a mal, aussi. Mais surtout, on exprime ses souhaits, ses sensations, et on se fait la guide intime des mains qui nous touchent, de la langue qui nous lèche, du sexe qui nous pénètre. Si vos cicatrices sont sensibles, il doit le savoir. Si vous êtes mal à l’aise, expliquez-lui pourquoi. La confiance est primordiale pour pouvoir s’abandonner, même en cas de difficultés. Et un homme bon aura à cœur de chercher des solutions avec vous et se réjouira (voire s’enorgueillera 😏) de les trouver. Il est très important de lui laisser une place dans votre reconstruction. J’ai moi aussi été tentée par le « Tu peux pas comprendre ! » un brin aigri… Alors d’abord si, ils peuvent comprendre en partie. Et pour le reste, il peuvent respecter et aider. Pourquoi nous en priver ?
5 – Expérimenter pour une vie sexuelle post cancer épanouie
Une fois l’envie revenue, les sensations réveillées et la communication instaurée, on peut déjà se féliciter du chemin parcouru et se détendre ! Avec quelques adaptations, on a retrouvé (ou trouvé ? 🥳) la fréquence vibratoire du septième ciel, seule ou à deux. Alors pas tous les jours et pas tout le temps, mais on a également appris à oublier la performance et à accepter les loupés sans dramatiser. On a su recréer de vrais moments de volupté, avec ou sans pénétration, avec ou sans orgasme. Patience, bienveillance et intention ont donc bien fonctionné. Mais comme je suis la réincarnation de Rocky Balboa (l’œil du tigre, vous vous souvenez ? On lâche rien !), je compte bien tenir ma deuxième promesse : je veux du sexe 2.0 ! J’en suis là de mon parcours au moment où j’écris ces lignes (qui m’ont émoustillée aussi, dites-donc, vive le processus de création !). J’ai retrouvé de la légèreté et je vois de nouveau la sexualité comme un jeu. Voici donc une liste non exhaustive d’idées pour continuer d’explorer et de sublimer l’amour charnel. Et non, je ne vous dirai pas lesquelles me tentent vraiment, à chacune ses délices (et fuck les conventions et la honte, c’est notre jardin secret !) :
- plonger dans la littérature érotique ;
- tester des jeux de rôles qui VOUS excitent ;
- trouver une pornographie qui VOUS convienne ;
- laisser s’exprimer votre côté animal (ça aide à déconnecter le cerveau) ;
- découvrir des lieux dédiés aux jeux sexuels (chambres d’hôtel à thème, par exemple) ;
- oser mettre un pied dans le libertinage, voire l’échangisme ;
- ouvrir votre couple au polyamour ;
- essayer avec une femme 👩❤️💋👩.
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Tout n’est pas sur vos épaules alors relâchez la pression. Le rôle de votre partenaire est évidemment essentiel. Parfois nos amoureux (ou amoureuses) y croient plus que nous-mêmes, alors en cas de baisse de moral, laissez-vous porter par leur optimisme. Non, notre vie sexuelle n’est pas finie parce que la ménopause s’est invitée un peu trop tôt ou que notre anatomie a été modifiée ! L’amour fait des miracles… S’il n’est pas vraiment au rendez-vous dans votre couple, posez-vous les bonnes questions. On n’a qu’une vie, et après un cancer, on en mesure encore plus l’urgence. Si vous êtes célibataire, faites-le pour vous, votre santé, votre bien-être, vos futures rencontres. Rappelez-vous qu’il n’y a rien de plus attirant qu’une femme épanouie et que non, votre passé de malade n’aura aucune importance pour quelqu’un qui vous désire. Réconciliez-vous avec les parties éprouvées de votre corps. Pourquoi ne pas vous offrir un magnifique tatouage ? De mon côté, c’est prévu ! Et n’oubliez pas que bien des spécialistes sont aussi là pour vous aider, même une fois sortie d’affaire.
Un dernier conseil : ayez de l’ambition pour vous-même et soyez audacieuse ! La résilience oblige parfois à sortir de sa zone de confort, mais le jeu en vaut la chandelle. Il n’y a pas de fatalité pour celles qui osent ! À nos orgasmes !
Article rédigé par Hélène Agénor, élève FRW.
Sources :
https://www.ligue-cancer.net/sites/default/files/brochures/sexualite-cancer-femme_2016-03-.pdf
https://www.docteur-eric-sebban.fr/cancer-col-uterin/sexualite-pendant-et-apres-cancer/
https://curie.fr/dossier-pedagogique/sexualite-apres-un-cancer-du-sein
https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-du-sein/Sexualite
En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent